Définition de HARNAIS OU HARNOIS

DÉFINITIONS - HISTORIQUE - ÉTYMOLOGIE -

Prononciation : har-nê ; l's se lie : un har-nê-z en bon état ou har-noî ; cette prononciation n'est usité qu'en poé

DÉFINITIONS

1
Anciennement. L'armure complète d'un homme d'armes.
Il faut remettre encor le harnois sur le dos
de François L'Hermite, sieur du Soliers, dit TRISTAN L'HERMITE dans M. de Chrispe, III, 2
Savez-vous pour la gloire oublier le repos, Et dormir en plein champ le harnois sur le dos ?
de Nicolas BOILEAU-DESPRÉAUX dans Sat. V
Endosser le harnois, embrasser la profession des armes.
Sémantique : Fig. et par plaisanterie. Endosser le harnois ou le harnais, se dit d'un homme d'Église ou de robe qui revêt les habits de sa profession.
Il sue dans son harnois, dans son harnais, se dit d'un homme trop vêtu.
Sémantique : Fig. et familièrement. Suer dans son harnois ou dans son harnais, être mal à l'aise.
Don Mathéo suait dans son harnois, Pressait, priait, conjurait avec larmes
de Jean de LA FONTAINE dans Belph.
Cet orateur s'échauffe dans son harnois ou dans son harnais, il parle avec beaucoup de chaleur et de véhémence.
Le duc de Noailles bavarda longtemps sans dire grand'chose ; peu à peu s'échauffant comme exprès dans son harnais : vous n'avez pas voulu, me dit-il, des finances
de Louis de Rouvroy, duc de SAINT-SIMON dans 405, 5
S'échauffer dans son harnais, dans son harnois, signifie aussi s'exciter.
Ma foi, le philosophe D'un feu long et discret dans son harnois s'échauffe
de Jean-François REGNARD dans Distrait, II, 6
Blanchir sous le harnais, sous le harnois, vieillir dans le métier des armes.
Sire, ainsi ces cheveux blanchis sous le harnois, Ce sang pour vous servir prodigué tant de fois....
de Pierre CORNEILLE dans Cid, II, 9
Excusez un Tartare, excusez un soldat Blanchi sous le harnois et dans votre service
de François-Marie Arouet, dit VOLTAIRE dans Orphel. IV, 2
Sémantique : Familièrement. Blanchir sous le harnois, sous le harnais, vieillir dans un métier quelconque.
Vous, qui avez blanchi, comme on dit, sous le harnois
de Jean-Baptiste POQUELIN, dit MOLIÈRE dans Pourc. I, 11
Il a vieilli sous le harnois en voyant ; il est spectateur de profession
de Jean de LA BRUYÈRE dans VII
Il faut mourir dans le harnois ou dans le harnais, se dit d'une profession pénible qu'on a embrassée et qu'on ne peut quitter.
Sémantique : Par extension, toute espèce d'habit militaire.
C'est à la faveur de mon harnais que j'ai parcouru l'Italie, où l'on ne pouvait voyager qu'avec une armée
de Paul Louis COURIER dans Lett. I, 115
2
Harnais, tout l'équipage d'un cheval de selle.
Tout l'équipage de cuir d'une voiture.
3
Sémantique : Par extension, chevaux et attirail d'un voiturier, d'un roulier. C'est un chemin trop étroit pour les harnais.
Cheval de harnais, cheval de charrette.
4
Sémantique : Terme d'oiselier et de pêcheur. Tout l'équipage qui sert pour la chasse des petits oiseaux ou pour la pêche.
5
Assemblage de plusieurs pièces, dont le rubanier et le gazier se servent pour confectionner leurs étoffes.
6
Sémantique : Terme de métallurgie. Double harnais, appareil qui fait mouvoir les soufflets.

HISTORIQUE

1
XIIe s.
Harnois [bagage] et toute la frapaille Qui riens ne surent de bataille, [il] Fist dejouste le mont ester
dans Brut, ms. f° 94, dans LACURNE
Du sanc des bestes ont lor cors ensanglantez, Lor harneiz e lor hons en ont avironnez
de WACE dans Rou, 1781
2
XIIIe s.
Bien i ot vint mile que homes, que femes, que enfans, et bien trois mile chars chargiés de leur robes et de leur harnois, sans leur autres proies
de Geoffroi de VILLEHARDOUIN dans CLXV
Nus ne puet ouvrer au diemenche.... se ce n'est pour enarmer un escu au besoing, ou pour metre uns estriez et un poitral à une sele ou un harnais à some atachier
dans Liv. des mét. 211
Hom quelconques il soit, se il vient de dehors Paris por ester à Paris, ou vait hors de Paris por ester ailleurs et il amaine ou remaine le harnais de son ostel en une nef
dans ib. 305
Et li destrier sor quoi [elles] seoient, Molt tost et molt souef ambloient ; Et sachiés bien que l'un hernois N'esligast mie [ne dédaignât] uns riches rois
dans Lai du trot
Il deit perdre son harneis de chevau et d'armeures, et deit estre bani fors dou pays
dans Ass. de Jér. I, 212
3
XIVe s.
Je vous donne congiet, vos harnas est toursés, Et mille florins d'or, que vous despenderés
dans Baud. de Seb. IX, 755
4
XVe s.
Jean Bourcinel avoit pourvu deux harnois d'armes bons et suffisans
de Jean FROISSART dans II, II, 85
Appartient il que les harnas Porte un corbeau ou un huas [chat-huant] De l'aigle et le noble courroy ?
de Eustache DESCHAMPS dans Poésies mss. f° 320
De bons harnois [habits], de bons chaucons [chaussons] vestus
dans ib. f° 234
Et y estoit portant le harnois le chancelier de France
de Philippe de COMMINES dans I, 2
Incontinent qu'il [le duc de Bourgogne] estoit descendu de cheval au lieu où il venoit pour loger, il ostoit le menu harnoys et retenoit le corps de la cuyrasse
de Philippe de COMMINES dans V, 6
5
XVIe s.
Nous sommes icy assez mal avitaillés, et pourveus maigrement des harnoys de gueulle
de François RABELAIS dans Garg. I, 32
Benoist monsieur, dit Panurge [à Dindenault qui s'exaltait à vanter ses moutons], vous vous eschauffez en vostre harnois
de François RABELAIS dans Pant. IV, 7
La jeunesse s'eschauffe si avant en son harnois toute endormie, que....
de Michel de MONTAIGNE dans I, 92
Nous louons un cheval de ce qu'il est vigoreux, non de son harnois
de Michel de MONTAIGNE dans I, 324
Harnois ne vaut rien s'il n'est deffendu
de Antoine LE ROUX DE LINCY dans Prov. t. II, p. 169
Que nul ne se ingere ou advance de pesquier [pêcher] d'aucun harnas es eauwes de nostre dit pays
dans Coust. gén. t. I, p. 813

ÉTYMOLOGIE

1
Picard, harnas, attelage de quatre chevaux ; wallon, herna ; namur. hernè ; Berry, harnas ; provenç. et espagn. arnes ; portug. arnez ; ital. arnese ; angl. harness ; du celtique : bas-bret. harnez, ferraille ; kimry, haiarn, fer ; irl. iaran ; mot qui est de même racine que le germanique : angl. iron, fer ; allem. Eisen ; anc. h. allem. îsarn. Le moyen h. allem. harnasch, et l'allem. mod. Harnisch viennent des langues romanes. Le sens propre est engin en fer, armure ; puis de là le mot a passé au sens de toute espèce d'engin soit pour le cheval, soit pour la chasse, soit pour la cuisine, etc.